En tant que parents, nous avons un rôle important à jouer dans l'accompagnement de nos enfants au long de cet apprentissage : nous pouvons les aider à vivre en paix avec leurs émotions, c'est-à-dire en harmonie avec eux-mêmes.
Sur ce sujet, il est un ouvrage que tout éducateur devrait avoir lu à mon sens, tant il est accessible et aidant, concrètement :
Au coeur des émotions de l'enfant d'Isabelle Filliozat
Extraits :
"L'enfant est une personne. L'émotion est au coeur de l'individu, c'est l'expression de sa Vie. Savoir l'écouter, la respecter, c'est écouter sa personne, la respecter.
Les parents sont souvent démunis devant l'intensité des affects de leurs enfants, ils cherchent volontiers à les calmer, à faire taire les cris, les larmes, l'expression de l'émoi. Or, l'émotion a un sens, une intention. Elle est guérissante. Les décharges émotionnelles sont le moyen de se libérer des conséquences d'expériences douloureuses. Au contraire, [...] la répression des émotions est nocive. Elle nous entraîne dans toutes sortes de processus défensifs, de répétitions douloureuses, de compulsions et de symptômes physiques.
Il est urgent d'apprendre à identifier, à nommer, à comprendre, à exprimer, à utiliser positivement les émotions, sous peine d'en devenir esclaves, pour le bonheur de nos enfants et des adultes qu'ils deviendront."
"Sentiments agréables ou non, pensées agréables ou non, comportements adaptés ou non, reconnaître ses émotions, c'est s'accepter comme on est, c'est construire la confiance en soi.
La conscience de soi se construit au fur et à mesure des expériences et pour autant que les émotions soient entendues, approuvées et parlées. Au contraire, quand l'environnement (parents, enseignants...) nie systématiquement les sentiments, refuse d'entendre, ridiculise les émotions... l'enfant en arrive à penser que ce qu'il ressent, pense et fait n'est pas conforme à ce que ses parents attendent.
[...]
Nous avons tous des émotions. Et nous ressentons tous les mêmes émotions dans les mêmes circonstances. Tous les humains sont physiologiquement semblables. Nous nous sommes tous un jour sentis tristes, las, effarés, terrifiés, furieux, haineux, coupables, honteux, exclus, jaloux, envieux, soulagés, ou heureux... Mais comme personne ne parle jamais de ses sentiments profonds, chacun se sent seul à vivre ce qu'il vit.
[...]
On croit souvent que la répression des pulsions sert la vie en collectivité et que, si tout le monde "s'écoutait", on ne pourrait plus vivre ensemble. Regardons la réalité, le taux actuel de violence nous montre que la route de la répression n'est pas la bonne. Le déni, la non-prise en compte, la non-écoute des émotions, ne font que les enfermer dans une Cocotte-Minute. Quand les soupapes deviennent insuffisantes, le couvercle saute.
[...]
En reconnaissant en soi ses affects, en les acceptant, en apprenant à les tolérer sans avoir peur d'être détruit par eux, en mettant des mots dessus, on peut demeurer conscient de la totalité de soi sans avoir à les vivre en actes.
Il est important de montrer à l'enfant que la reconnaissance et l'expression verbale de ses impulsions les plus violentes ne détruisent ni la relation, ni la personne."
Je pense que je reparlerai de ce sujet des émotions, il y aurait tant à dire !
Pour ma très sensible petite puce, qui est capable de pleurer à chaudes larmes en écoutant "Ne pleure pas Jeannette" ou "A la volette" (parce que le petit oiseau s'est blessé...), j'ai fabriqué un jeu qui consiste à placer des visages humains exprimant des émotions sur les "cartes-smileys" correspondantes :
C'est un exercice difficile (même mon homme, que j'aime prendre comme cobaye pour tester mes activités, a hésité à plusieurs reprises), et Emma n'est pour l'instant jamais allée jusqu'au bout.
Cela n'a aucune importance car, bien au-delà d'un simple jeu de classement, l'objectif est ici de libérer la parole :
- "Pourquoi il est triste le petit garçon, maman ?"
- "A ton avis, pourquoi, ma puce ?"
- "... Parce que sa copine est malade..." (sic)
- "Et pourquoi elle est en colère cette dame ?"
- "A ton avis ?"
- "Parce que son petit frère l'a tapée !" (re-sic)
Poser des mots, toujours...
Il est super ce petit jeu! Quelle bonne idée!
RépondreSupprimerMon premier commentaire pour vous dire que j'aime beaucoup ce livre que je suis en train de lire en ce moment. Je tenais également à vous remercier pour ce blog très inspirant où je trouve non seulement des pistes qui alimentent ma réflexion quotidienne sur l'éducation de mes enfants, mais aussi une mine d'idées pour mettre tous les jours en pratique la philosophie Montessori à la maison. Il n'est pas rare que les billets que vous publiez entrent en résonance avec mes pensées ou activités du moment. Merci encore et bravo !
RépondreSupprimerJ'adore ce livre, ce fût le tout premier que j'ai lu, et il m'a ému, et m'a aider dans ma propre histoire pour avancer.
RépondreSupprimerPour le jeu, je trouve que c'est une bonne idée, on a un livre ou on l'on trouve des bébés qui pleurent, qui rient... il me le dit oh il pleure, ect... cela leur permet comme tu le dis de décharger leurs émotions.
Ce livre - il me semble qu'on avait eu l'occasion d'en parler ensemble? - est un livre qui m'a beaucoup dérangée et l'un des rares que je n'ai pas finis, alors qu'il semble faire la quasi unanimité dans le monde du maternage.
RépondreSupprimer... alors, je mets mon grain de sel. ;)
Au fil d'échanges avec des mamans, je crois que j'ai compris ce qui me choquait dans le point de vue du livre. En fait, je suis d'accord avec l'idée générale de ne pas nier les émotions de l'enfant ou se poser comme "sachant mieux que lui ce qu'il ressent" (par exemple, l'expression "j'ai froid pour toi" me fait bondir !) mais il y a deux choses dans ce livre me dérangent :
- l'idée que si les émotions de l'enfant perturbent le parent, c'est parce qu'elles le renvoient à son histoire (forcément mal vécue) à lui, que j'ai trouvée très culpabilisante : c'est une idée inacceptable pour certains parents qui ont vécu des choses difficiles et se sont battus pour se construire, de les renvoyer sans cesse à un travail sur eux-même qui n'aurait pas été fait correctement... alors que reconaître qu'un enfant qui fait un caprice et qui hurle, c'est juste physiquement insuportable, c'est soutenant et libérateur (à défaut de faire cesser les hurlements),
- le danger de basculer dans le "tout accueillir" et "tout tolérer" : je crois qu'il est important pour l'enfant puis l'adulte d'apprendre à maîtriser ses émotions ou à les surmonter, ne pas faire n'importe quoi sous le coup de la colère par exemple... comme souvent, ça doit être une question de "dosage" pour accueillir sans encourager. Et comme toujours, ça dépend de la personnalité de l'enfant ; reformuler les émotions, ça fonctionne avec ma grande mais pas du tout avec sa petite sœur pour qui ça aurait plus tendance à rajouter de l'eau au moulin et relancer la crise (de larmes, hurlements, au choix).
Là-dessus, on touche sans doute aussi aux valeurs qu'on veut transmettre (ne pas laisser les sentiments prendre le pas sur la raison) et donc à quelque chose de très personnel.
En tous cas, merci pour ton article... et l'idée d'activité. Ma petite miss est aussi très sensible aux émotions des autres - quand mon ordi me fait des misères, elle est la première à s'en rendre compte en me demandant si je suis fâchée ;) - c'est peut-être un moyen d'apprivoiser aussi ces notions (peur, tristesse, colère...) en intégrant qu'elles font partie de la vie?
... et grâce à toi, on a débattu émotions avec une amie ce matin, comme quoi c'est un vaste sujet. ;)
je l'ai lu aussi et j'y ai puisé beaucoup d'inspiration pour mieux entendre et écouter les émotions de mes enfants mais je suis un peu comme Annette : à certains moments ce livre m'a fortement culpabilisée. j'ai "zappé" certains passages et lus et relus d'autres et j'hésite à découvrir ses autres livres.
RépondreSupprimertoutefois je pense qu'il fait partie de la liste des livres à lire lorsque l'on aide des enfants à grandir et à devenir autonomes.
Natym : Merci !
RépondreSupprimerSteph : Bienvenue et merci beaucoup pour ce gentil commentaire qui me va droit au coeur. J'espère que mes billets continueront à vous parler et vous inspirer. :-)
Laetitia : "Au coeur des émotions de l'enfant" est aussi l'un des premiers livres ENV que j'ai lu, et il fait partie de ceux auxquels je reviens le plus. ;-)
Annette, Nathalie : Si vous avez trouvé ce livre culpabilisant, c'est sans conteste qu'il peut l'être. ;-)
Comme je le disais c'est l'un des premiers livres ENV que j'ai lu, et je l'ai trouvé pour ma part très déculpabilisant parce que c'était la première fois que j'entendais des choses comme :
- le métier de parent est incroyablement difficile,
- les parents n'ont pas besoin de conseils ni de recettes mais de trouver confiance en eux et d'apprendre à écouter leur enfant,
- s'occuper seul(e) d'un tout-petit et répondre à tous ses besoins / écouter toutes ses émotions relève de la mission impossible,
- nos réactions parfois disproportionnées sont le plus souvent dictées par notre passé et notre vécu d'enfant.
Quant au fait qu'il est possible de dépasser nos blocages et d'accueillir vraiment les émotions de nos enfants au prix d'un travail sur nous-mêmes, pour moi c'est plutôt une idée très positive et optimiste. :-)
A chacun sa lecture donc... Sans doute nos réactions sont-elles à mettre en lien avec nos sensibilités et vécus forcément différents. ;-)
Annette : Absolument sans provocation aucune, je veux juste te dire que je ne trouve pas les colères et les pleurs/hurlements de mes enfants physiquement insupportables... Eprouvants, hyper désagréables, bouffeurs d'énergie, mais pas insupportables. J'arrive donc le plus souvent à les accepter et les accueillir. Or, il se trouve que j'ai été une enfant très écoutée et respectée dans ses émotions...
Je pense pour ma part que Filliozat a raison quand elle nous renvoie à notre propre histoire pour expliquer nos difficultés face à l'expression des émotions de nos petits. Ce qui bien sûr n'enlève rien à l'aspect potentiellement culpabilisant de tels propos. ;-)
Concernant le deuxième point que tu évoques, elle parle bien de proposer à l'enfant plus grand (c'est vague...) un "coin à colère", à l'écart.
Je ne peux pas généraliser évidemment, mais lorsqu'Emma est en colère, elle a clairement besoin de nous à ses côtés pour s'en sortir. Pour moi, cela ne se joue pas en terme de limites à poser (acceptable/inacceptable) car elle est dans ces moments-là incapable d'intellectualiser quoi que ce soit. Elle ne comprendrait pas une mise à l'écart et cela serait même très (trop) violent pour elle... Ce que je fais, en revanche, c'est m'éloigner lorsque je sens qu'elle a "repris le dessus" sur sa colère, en lui disant que c'est à présent à elle de trouver les moyens de se calmer totalement. Lorsque la crise est vraiment terminée, elle a besoin d'un long temps de câlins, d'apaisement. Elle est vraiment secouée, "sonnée", comme si elle revenait de très loin. Mon avis est qu'elle est encore loin d'être capable de surmonter tout cela seule...
Je suis d'accord avec toi quand tu dis qu'il ne faut pas non plus tout accepter sous couvert d'accueillir les émotions. Pendant les crises, les limites ici restent les mêmes : pas de coups, pas de casse volontaire, etc. Il peut m'arriver de la contenir physiquement pour l'empêcher de me/se faire du mal.
Merci beaucoup en tout cas pour ces réflexions qui m'ont à nouveau fait pas mal cogiter, et pour ta sincérité. :-)
Merci infiniment pour cet article auquel je suis très sensible. le travail sur les émotions représente un temps important dans notre quotidien. Je vais m'empresser de lire ce livre!
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